Multiples Parkeriens. Typologies d'écoute et ontologies de la musique

Cette étude est centrée sur des questions d’ontologie musicale soulevées par l’écoute d’exécutions multiples et par la distinction de typologies d’écoute. Il s’agit ici de différencier un modèle d’écoute indexé sur des catégories qu’on appelle « matrice visuelle » (en particulier dans la musique classique-romantique), d’un autre modèle, indexé sur celles qu’on nomme « audiotactiles », chacune se référant à des performances multiples. La thèse centrale est que, dans chaque culture d’écoute spécifique, certaines qualités (telles que le groove dans le jazz et le rock, la conduite de la pulsation dans la musique romantique) ont une pertinence et une saillance perceptive inaudibles et non valables dans un autre mode auditif. Cette distinction a des implications ontologiques car elle concerne les propriétés constitutives d’un type d’objet musical qui suppose, avant toute considération esthétique, une pertinence phénoménologique. Le même critère d’identité entre deux morceaux dépend de la structure ontologique à laquelle on adhère, de sorte que deux exemples considérés comme identiques dans un cadre ontologique défini peuvent être considérés comme différents dans un autre. Pour cette raison, on doit admettre sur le plan théorique la nécessité d’ontologies appliquées – qui légitiment par exemple la perception auditive des qualités « groovémiques » – en fondant les conditions d’une ontologie des musiques « audiotactiles » (jazz, rock, pop, etc.). Enfin, on problématise la question de la production d’exécutions multiples en jazz, où les problèmes ontologiques sont liés à la constitution de multiples et à leur catégorisation (en l’occurrence, par le concept de « double » ou de « réplique »).