« Paralipomènes » sont les choses omises, mises de côté, abandonnées ; « paralipomènes », toutefois, sont aussi les choses qui manquent ou bien que l’on rate. Pourquoi commencer par ce qui a été omis et non par ce qui peut nous introduire à la question annoncée, la protologie ? Pourquoi « para-lipomènes » et non pas « prolégomènes » ? « Prolégomènes », c’est-à-dire les choses « dites avant », une sorte d’avant propos introduisant au texte tout en le rendant intelligible, tout comme les « pro-légomènes kantiens » clarifient les difficultés de la Critique de la raison pure. Partir des paralipo-mènes suppose de partir déjà d’une omission, de quelque chose qu’on a laissé de côté, d’un manque ou, peut-être, d’un ratage. Ce qui ne semble pas concerner la protologie. Des protologies ne man-quent pas et elles sont toutes l’expression d’un effort pour penser le commencement au commence-ment, voire la manière dont le commencement se pose. Mais n’y a-t-il pas quelque chose de para-doxal dans toute philosophie qui s’interroge sur le commencement, sur un temps ou un moment où elle n’était pas ? Et cela est vrai de tout commencement, y compris de notre naissance elle-même, que nous ne connaissons que par les récits des autres. Et pourtant, ce discours nous appartient, il est le nôtre, car il nous livre à la pensée elle-même, à la philosophie. Voilà donc le paradoxe : ce n’est pas le discours protologique qui manque, le logos du protos. Nous disposons de plusieurs récits portant sur le protos; mais il s’agit toujours de discours seconds, qui succèdent au moment où nous manquons, à ce moment premier qui est le nôtre mais qui ne nous appartient pas, qui est le nôtre en tant que proprius et alter. Peut-on dès lors penser la protologie ? Sans doute, puisqu’elle l’a déjà été. Mais de quelle manière ? Cela reste peut-être une tâche à venir, non seulement parce qu’elle ne sau-rait être épuisée dans ces quelques pages, mais surtout parce que le chemin vers le commencement est la tâche d’une vie. Pour le moment, nous ne pouvons proposer que des tentatives, qui seront nos paralipomènes, ce qui manque mais qui, tout en manquant, nous conduit là où c’est justement nous qui manquons.

Peut-on penser la protologie? Paralipomènes d’une tâche à venir

CANULLO, Carla
2012-01-01

Abstract

« Paralipomènes » sont les choses omises, mises de côté, abandonnées ; « paralipomènes », toutefois, sont aussi les choses qui manquent ou bien que l’on rate. Pourquoi commencer par ce qui a été omis et non par ce qui peut nous introduire à la question annoncée, la protologie ? Pourquoi « para-lipomènes » et non pas « prolégomènes » ? « Prolégomènes », c’est-à-dire les choses « dites avant », une sorte d’avant propos introduisant au texte tout en le rendant intelligible, tout comme les « pro-légomènes kantiens » clarifient les difficultés de la Critique de la raison pure. Partir des paralipo-mènes suppose de partir déjà d’une omission, de quelque chose qu’on a laissé de côté, d’un manque ou, peut-être, d’un ratage. Ce qui ne semble pas concerner la protologie. Des protologies ne man-quent pas et elles sont toutes l’expression d’un effort pour penser le commencement au commence-ment, voire la manière dont le commencement se pose. Mais n’y a-t-il pas quelque chose de para-doxal dans toute philosophie qui s’interroge sur le commencement, sur un temps ou un moment où elle n’était pas ? Et cela est vrai de tout commencement, y compris de notre naissance elle-même, que nous ne connaissons que par les récits des autres. Et pourtant, ce discours nous appartient, il est le nôtre, car il nous livre à la pensée elle-même, à la philosophie. Voilà donc le paradoxe : ce n’est pas le discours protologique qui manque, le logos du protos. Nous disposons de plusieurs récits portant sur le protos; mais il s’agit toujours de discours seconds, qui succèdent au moment où nous manquons, à ce moment premier qui est le nôtre mais qui ne nous appartient pas, qui est le nôtre en tant que proprius et alter. Peut-on dès lors penser la protologie ? Sans doute, puisqu’elle l’a déjà été. Mais de quelle manière ? Cela reste peut-être une tâche à venir, non seulement parce qu’elle ne sau-rait être épuisée dans ces quelques pages, mais surtout parce que le chemin vers le commencement est la tâche d’une vie. Pour le moment, nous ne pouvons proposer que des tentatives, qui seront nos paralipomènes, ce qui manque mais qui, tout en manquant, nous conduit là où c’est justement nous qui manquons.
2012
9783841793607
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